En face de chez nous, heureusement, il y beaucoup de petits immeubles, ce qui nous assure une vue dégagée, sur plus loin, Xujiahui, Jing'an, et même, par temps clair, sur Pudong. En face de notre immeuble, il y en a trois, un peu plus bas, disons une douzaine d'étages; ils ne nous gâchent donc pas la vue, mais on les voit bien... sans les voir vraiment, ils font partie du décor.
Il a fallu que nos visiteurs de l'été, quelques minutes avant leur retour vers le vieux continent, attirent notre attention sur de nouveaux voisins de l'immeuble d'en face. Une famille endormie sur le toit.
Des gens qui dorment dans la rue, on en voit, parfois, pas tous les jours, pas de bidonville non plus. Mais c'est quand même toujours choquant que des gens dorment dehors, aux pieds de monstres de verre et de fer futuristes et de boutiques de luxe. C'est la première fois que nous voyons une famille sur un toit. Forcément, depuis la rue, on ne sait pas ce qui se passe en hauteur. Nous les regardons le matin, dormir, tous les quatre sur leurs cartons, se réveiller, gentiment, d'abord le père, puis les enfants, puis la mère, quand le père s'en va. La fille qui s'occupe de son petit frère pendant que la mère range "la chambre". Nous observons quand ils arrivent le soir. A dix heures, ils sont installés.
Nous les regardons, perplexes. Aussi un peu troublés d'avoir une chambre d'amis souvent vide. Ce n'est pas tellement le fait qu'ils dorment dehors qui nous perturbe. Il fait chaud, c'est l'été... mais c'est de devoir dormir là-haut, c'est foutûment haut et dangereux ! Et, toujours la même rengaine, c'est inadmissible dans un pays "socialiste à spécificité chinoise" dont le gouvernement est riche.
La maison du vigile |
Mardi, j'ai essayé d'entrer dans le bâtiment. Par devant, on oublie, il y a une banque, entrée surveillée avec des caméras. Pour aller remplir son porte-monnaie, pas de souci, pour monter sur le toit, ce n'est pas le bon plan. Par derrière, pas de caméra, mais un vigile plutôt vigilant qui ne m'a pas laissée entrer sans raison valable. Je n'en avais pas, j'ai joué à la touriste curieuse ...et je ne suis pas entrée. Comme le soir-même je voyais Kelly qui m'aide parfois à décoder cet étrange pays, le sujet de notre moment de conversation en chinois était tout trouvé. Cette fois, son explication m'a déconcertée : Comme il fait très chaud, il arrive que des gens préfèrent dormir dehors plutôt que dans la moiteur de leur logement. Dans les campagnes, les gens dormaient volontiers devant chez eux en été. Ah, Kelly, tu peux faire mieux que ça ! J'ai vérifié, il y a des clims hideuses à tous les étages... Nous ne sommes pas parvenues à un accord sur ce sujet. Je reste convaincue que ces gens n'ont pas de logement.
Mercredi, la mère a replié leur lit de fortune, a même passé un coup de balai à l'endroit où il reposait et, depuis, ils ont disparu. Alors je me demande, est-ce ma visite dans la cour de l'immeuble ou mes regards intrusifs depuis mon balcon qui les ont faits fuir ? Est-ce que Kelly avait raison puisque leur départ coïncide avec une baisse de température ? Ont-ils trouvé un logement ? Et depuis deux matins, je scrute les toits avoisinants, des fois qu'ils auraient changé de lieu.
Pendant ce temps, le nouveau quartier d'en face est toujours vide, les barricades sont tombées, mais les gardiens restent. Après avril 2012, on nous parle de novembre 2012, à des prix exorbitants.
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